Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais est né en 1732 à Paris, où il meurt en 1799, au terme d’une vie pas banale, de ces vies que nous ne faisons que rêver à notre époque. Pourtant, cette vie nous tend les mains, alors saisissons-la. Beaumarchais est une des grandes figures du Siècle des Lumières, notre siècle préféré, c’est aussi un de nos écrivains fétiches, avec Voltaire, Diderot, Rousseau, Montesquieu, Marivaux.
Une vie insolente…de vie
Homme d’affaires, écrivain, dramaturge, poète, diplomate, espion, même musicien, l’œuvre de Beaumarchais est parfois dépassée par son personnage, surtout depuis l’excellent film qui le remit à la mode il y a une dizaine d’années, Beaumarchais l’insolent. Car si l’humour, la satire, l’esprit critique, la révolte, la pétulance, et même parfois une certaine outrecuidance, voire une frivolité, caractérisent le Dix Huitième siècle, Beaumarchais est bien un insolent.
C’est pour cela que nous aimons Beaumarchais : homme d’aucun système, arriviste, affairiste, libertin, opportuniste, il est inépuisable, il traverse le siècle avec humanité, humour, sans esprit de système, il nous laisse un exemple, sa vie.
Comme le dit Louis Jouvet :
« Horloger, musicien, chansonnier, dramaturge, auteur comique, homme de plaisir, homme de cœur, homme d’affaires, financier, manufacturier, éditeur, armateur, fournisseur, agent secret, négociateur, publiciste, tribun par occasion, homme de paix par goût, et cependant plaideur éternel. »
Fils d’horloger, Beaumarchais est l’inventeur du mécanisme d’échappement à hampe, qu’un horloger célèbre, Lepaute, essaie ensuite de lui dérober. Beaumarchais écrit un premier Mémoire judiciaire, premier d’une longue série, et obtient un arbitrage favorable. Cette affaire lui donne l’opportunité d’être introduit à la Cour, jusqu’à Madame de Pompadour, et au Roi. Il est anobli en achetant une charge de secrétaire du roi, prend le nom de Beaumarchais, et s’intéresse aux affaires. Il voyage à Madrid et écrit « Le sacristain », première ébauche du Barbier de Séville ?
Ah, j’oubliais : il se marie une première fois, avec une veuve de dix ans son aînée, qui meurt peu de temps après. On le soupçonne de l’avoir tuée pour hériter de sa fortune. Il se défend devant les tribunaux, écrit des mémoires judiciaires pour faire valoir ses points de vue. En 1774, il se marie pour la troisième fois (déjà…). Il est au cœur d’une dispute avec le Chevalier de la Blache ; le Parlement tranche en faveur du chevalier, Beaumarchais finit par avoir le dessus du conseiller Goëzman, chargé de la défense du Chevalier, grâce à l’écriture de quatre mémoires, et il obtient son exclusion du Parlement. Il est ensuite envoyé à Londres à plusieurs reprises, pour négocier la suppression de libelles écrits contre le Roi, puis pour récupérer des documents secrets des mains du Chevalier d’Eon.
A partir de 1775, il défend l’intervention de la France dans la guerre d’indépendance d’Amérique, devient intermédiaire entre les insurgés et les autorités françaises. Il est ensuite trafiquant d’armes pour le compte de Louis XVI, et récupère au passage une bonne partie de la marge dégagée sur la poudre et les munitions vendues aux Américains.
Il devient ensuite l’éditeur de la première édition des œuvres de Voltaire, obtient à la Révolution la reconnaissance des droits d’auteur, transformant ainsi le statut de l’écrivain. Il se rallie à la Révolution, fait des affaires un peu louches, vend des armes, mais cette fois-ci cela tourne mal, il est emprisonné, échappe de peu à l’échafaud, s’exile en Allemagne, revient en France, après avoir écrit ses Mémoires, et enfin il meurt, comme tout le monde.
Et ses œuvres ?
Comment Beaumarchais trouve t-il donc le temps d’écrire ? Il en trouve le temps, entre deux affaires, ou deux missions d’agent secret pour le compte du Roi. En 1767, il s’essaie au drame sérieux avec Eugénie. En 1775, c’est Le barbier de Séville, puis en 1778, Le mariage de Figaro. Certains prétendent que la fameuse réplique de Figaro dans la pièce du même nom annonce la Révolution Française. C’est possible. On lui laissera le bénéfice du doute. Nul doute que dans ce cas de figure, il avait déjà prévu le coup et investi dans une entreprise de travaux publics…avant la prise de la Bastille.
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